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Quand le monde s’est arrêté : ce que la pandémie m’a appris sur le cinéma et le silence

  • Photo du rédacteur: Mehdi Salmi
    Mehdi Salmi
  • 1 mai 2020
  • 2 min de lecture

Je me souviens encore du coup de fil.

On était en plein tournage — cette journée rare où tout s’aligne enfin : la lumière, le rythme, les comédiens. Et puis le message est tombé, venu du Centre Cinématographique :

« Vous devez arrêter. »


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Pas d’explication, juste une phrase calme, presque abstraite, mais qui sonnait comme la fin de quelque chose de plus grand que le film lui-même.


Le soir même, le pays s’est confiné. Les rues se sont vidées.

Le monde venait d’appuyer sur pause.



Au début, c’était l’incrédulité.

On passe des années à courir, à enchaîner les projets, les repérages, les tournages… Et tout à coup, tout s’effondre dans le silence.

Les camions sont garés, les caméras rangées, les feuilles de service n’ont plus aucun sens.

Pour la première fois de ma vie professionnelle, je ne savais pas quand — ni même si — on allait reprendre.


Mais une fois le chaos passé, un autre silence est apparu.

Pas celui de l’absence de travail, non.

Un silence plus profond, plus dense — celui qui oblige à écouter, à se confronter à soi-même, à poser les questions qu’on évitait jusque-là.



La pandémie a fait disparaître le bruit du quotidien.

Sans la course des tournages, sans les urgences et les logistiques, j’ai redécouvert d’autres parts de moi : l’auteur, l’observateur, le rêveur qui avaient été engloutis par la mécanique du cinéma.


J’ai recommencé à écrire.

À revoir des films non pas pour m’en inspirer, mais pour m’y réfugier.

À lire, à dessiner, à noter des idées sans objectif précis.

Pour la première fois depuis longtemps, créer n’avait plus rien à voir avec produire. C’était juste une manière de respirer à nouveau.



L’industrie, elle aussi, a dû se regarder en face.

Du jour au lendemain, on s’est tous posé la même question : qu’est-ce qui est essentiel ?

Qu’est-ce que le cinéma, quand les caméras s’arrêtent ?

Les plateformes ont prospéré, mais la salle obscure, ce moment collectif où tout le monde respire ensemble, a disparu.

Et dans ce vide, on a compris à quel point cette expérience était fragile — et irremplaçable.



Quand le monde s’est rouvert, le retour sur les plateaux n’avait plus la même saveur.

Oui, il y avait de la joie.

Mais aussi une conscience nouvelle : celle du prix du mouvement permanent.

La pandémie m’avait appris la valeur de la pause — de prendre le temps de regarder, de ressentir, avant d’agir.

Je ne voulais plus courir pour suivre le rythme.

Je voulais créer à partir d’un autre endroit : celui de la présence.



D’une certaine manière, ce silence forcé m’a rendu ma voix.

Il m’a rappelé que le cinéma n’est pas seulement une affaire de mouvement, mais de sens.

De ce qui se passe entre deux plans, entre deux silences.


Le monde s’est arrêté, oui.

Mais c’est peut-être dans cette pause que j’ai réappris à regarder.


Parfois, il faut que la caméra s’arrête — pour se souvenir de pourquoi on a commencé à filmer.


 
 
 

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